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Bibliothèque Numérique Alchimique du Merveilleux (BNAM)
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ÉPÎTRE DU FEU PHILOSOPHIQUE
Pontanus Jean
Article mis en ligne le 4 février 2010
dernière modification le 28 janvier 2022

Moi, Jean Pontanus, qui suis allé en plusieurs régions et royaumes - afin de connaître certainement ce
que c’est que la Pierre des Philosophes-, après avoir parcouru tous les côtés du monde, je n’ai trouvé que
des faux Philosophes et des trompeurs. Néanmoins, étudiant toujours dans les livres des Sages, et mes
doutes s’augmentant, j’ai trouvé la vérité ; mais nonobstant que j’eusse la connaissance de la matière, j’ai
erré deux cents fois avant que de trouver l’opération et pratique de cette vraie matière.
Premièrement, j’ai commencé mes opérations par les putréfactions du Corps de cette matière, pendant
neuf mois, et je n’ai rien trouvé. Je l’ai mise au bain-marie pendant quelques temps, et j’ai semblablement
erré. Je l’ai tenue et posée dans un feu de calcination pendant trois mois, et j’ai mal opéré. Tous les genres
et manières de distillations et sublimations, comme disent ou semblent dire les Philosophes - tel Geber,
Archélaüs et presque tous les autres - je les ai tentés et essayés, et n’ai pareillement rien trouvé. Enfin, j’ai
tâché de parvenir et parfaire le sujet de tout l’Art d’Alchimie, de toutes les manières imaginables, qui se
font par le fumier, le bain, les cendres, et par mille autres genres de feux, dont les Philosophes font
mention dans leurs livres ; mais je n’ai rien découvert de bon.
C’est pourquoi, je me mis pendant trois ans continuels à étudier les livres des Philosophes, entre autres le
seul Hermès, les brèves paroles duquel comprennent tout le magistère de la Pierre ; quoiqu’il parle assez
obscurément des choses supérieures et inférieures, du Ciel et de la Terre.
Toute notre application et notre soin, donc, ne doit être qu’à la connaissance de la vraie pratique, dans le
premier, le second, et le troisième oeuvre. Ce n’est point le feu de bain, de fumier, ni de cendres, ni aucun
de tous les autres feux que nous chantent les Philosophes, et nous décrivent dans leurs livres.
Qu’est-ce donc que ce feu qui parfait et achève tout l’oeuvre, depuis le commencement jusqu’à la fin ?
Certainement tous les Philosophes l’ont caché ; mais, pour moi, touché d’un mouvement de pitié, je le
veux déclarer avec l’entier accomplissement de tout l’oeuvre.
La Pierre des Philosophes est unique, et une, mais cachée et enveloppée en la multiplicité de différents
noms, et avant que tu la puisses connaître tu te donneras bien de la peine ; difficilement la trouveras-tu de
ton propre génie. Elle est aqueuse, aérienne, ignée, terrestre, flegmatique, colérique, sanguineuse et
mélancolique. Elle est un soufre et pareillement Argent vif.
Elle a plusieurs superfluités, qui, je t’assure par Dieu vivant, se convertissent en vraie et unique Essence,
moyennant notre feu. Et celui qui sépare quelque chose du sujet - croyant cela nécessaire-, ne connaît
assurément rien à la Philosophie. Car le superflu, le sale, l’immonde, le vilain, le bourbeux, et,
généralement toute la substance du sujet, se parfait en corps spirituel fixe, par le moyen de notre feu. Ce
que les Sages n’ont jamais révélé, et, fait que peu de gens parviennent à cet Art ; s’imaginant que quelque
chose de sale et de vilain doit être séparé.
Maintenant il faut faire paraître, et tirer dehors les propriétés de notre feu ; s’il convient à notre matière
selon la manière dont j’ai parlé, c’est-à-dire s’il est transmué avec la matière. Ce feu ne brûle point la
matière, il ne sépare rien de la matière, ne divise ni n’écarte les parties pures des impures, ainsi que disent
tous les Philosophes, mais convertit tout le sujet en pureté. Il ne sublime pas comme Geber fait les sublimations, et Arnaud pareillement, et tous les autres qui ont parlé des sublimations et distillations. Il
se fait et parfait en peu de temps.
Ce feu est minéral, égal et continuel, il ne s’évapore point, si ce n’est qu’il soit trop excité ; il participe du
soufre, il est pris et provient d’ailleurs que de la matière. Il rompt, dissout, et congèle toutes choses, et
semblablement congèle et calcine ; il est difficile à trouver par l’industrie et par l’Art. Ce feu est l’abrégé et
le raccourci de tout l’oeuvre, sans prendre autre chose, du moins peu, et ce même feu s’introduit et est de
médiocre ignition ; parce qu’avec ce petit feu tout l’oeuvre est parfait, et sont faites, ensemble, toutes les
requises et dues sublimations.
Ceux qui liront Geber et tous les autres Philosophes, quand ils vivraient cent millions d’années, ne le
sauront comprendre ; car ce feu ne se peut découvrir que par la seule et profonde méditation de la pensée,
ensuite on le comprendra dans les livres, et non autrement. L’erreur en cet Art, ne consiste qu’en
l’acquisition de ce feu, qui convertit la matière en la Pierre des Philosophes.
Étudies-toi donc à ce feu, parce que si moi-même je l’eus premièrement trouvé, je n’eus pas erré deux
cents fois sur la propre matière. A cause de quoi je ne m’étonne plus si tant de gens ne peuvent parvenir à
l’accomplissement de l’oeuvre.
Ils errent, ont erré et erreront toujours, en ce que les Philosophes n’ont mis leur propre agent qu’en une
chose, qu’Artéphius a nommée, mais il n’a parlé que pour lui. Si ce n’est que j’ai lu Artéphius, que je l’ai
entendu et compris, jamais je ne serais parvenu à l’accomplissement de l’oeuvre.
Voici quelle est cette pratique : il faut prendre la matière avec toute diligence, la broyer physiquement et
la mettre dans le feu, c’est-à-dire dans le fourneau ; mais il faut aussi connaître le degré et la proportion du
feu. A savoir, il faut que le feu externe excite tant seulement la matière ; et, en peu de temps ce feu, sans
y mettre les mains en aucune manière, accomplira assurément tout l’oeuvre. Parce qu’il putréfie, corrompt,
engendre et parfera tout l’ouvrage, faisant paraître les trois principales couleurs, la noire, la blanche, la
rouge. Et moyennant notre feu la médecine se multipliera si elle est conjointe à la matière crue, non
seulement en quantité mais aussi en vertu.
Recherches donc de toutes les forces de ton esprit ce feu, et tu parviendras au but que tu t’es proposé ; car
c’est lui qui fait tout l’oeuvre, et il est la clef de tous les Philosophes, laquelle ils n’ont jamais révélée dans
leurs livres. Si tu penses bien profondément aux propriétés du feu ci-dessus, tu la connaîtras, mais non
autrement.
Donc, touché d’un mouvement de pitié, j’ai écrit ceci ; mais, et afin que je me satisfasse, le feu n’est point
transmué avec la matière, comme je l’ai dit ci-dessus. J’ai bien voulu le dire et en avertir les prudents de
ces choses, pour qu’ils ne dépensent pas inutilement leur argent, mais qu’ils sachent auparavant ce qu’ils
doivent chercher, et, par ce moyen, parviendront à la vérité de l’Art ; non pas autrement.
à Dieu.